L’affaire aurait presque pu passer inaperçue, comme d’autres projets dont on s’aperçoit après coup qu’ils engloutissent pas mal de fric bien plus utile ailleurs. C’est le cas du projet d’échangeur entre les sorties 17 et 18 du périphérique Est de Toulouse.
Si l’échangeur de Borderouge semblait justifié pour désengorger la sortie Union/Croix daurade, la nécessité de celui-ci est bien douteuse. Comme le relève le maire de L’Union Marc Peré, dans son adresse au Conseil métropolitain, « côté Ouest (Toulouse) son utilité semble nulle : il n’y a aucune voie pénétrante, aucune rue permettant d’accéder à Toulouse », et « côté Est, la clinique privée de Croix du Sud est en proximité immédiate. » Une faveur accordée à cette clinique ? La question est légitime.
D’autant plus que l’Autorité de Régulation des transports a rendu un avis négatif le 17 juin 2017 indiquant : « Il ressort toutefois des pièces du dossier que la création de ce nouveau diffuseur conduirait à accroître la congestion de la rocade Est et donc à dégrader les conditions de circulation des usagers de l’autoroute. » [1]
Forts de ces arguments, et pour un chantier engageant la Métropole pour la bagatelle de 17,95 millions, les élus de l’opposition à J.L. Moudenc ont demandé que la délibération « Jonction Est » soit soumise au vote du Conseil métropolitain. En vain. Ladite délibération a été adoptée par le seul Bureau de la Métropole le 3 mars 2021.
« En effet [comme le note Marc Péré] le 26 septembre 2019, une délibération portant sur l’approbation d’une convention tripartite, liant la société Vinci, la Métropole et la Région, avec un cofinancement du projet à hauteur de 15 millions pour Toulouse-Métropole et de 3 millions pour la Région, a été adoptée par le Bureau de Toulouse-Métropole. Cette convention stipulait dans son article 4.5 que la somme forfaitaire payée par les collectivités sur estimation de Vinci, serait revue à la baisse si le coût final de l’échangeur, une fois livré, était inférieur à l’estimation initiale. Cette clause, dite de « retour à bonne fortune », était là pour préserver les intérêts financiers de la Métropole. Elle a été refusée par la voix du PDG de Vinci, lors d’une rencontre à Toulouse en octobre 2019, alors qu’elle figurait dans le projet de convention votée à l’identique par la Région et par la Métropole le 26 septembre 2019. Pourtant, cette clause figure dans l’ensemble des contrats de concession d’autoroutes entre l’Etat et les sociétés concessionnaires, comme le confirme un courrier des ministres Borne et De Rugy daté du 4 avril 2019. »
Pour Moudenc, le caractère forfaitaire du contrat ainsi que l’inclusion de l’exploitation et de la maintenance dans les coûts estimés interdisent des réajustements financiers au moment de la livraison de l’échangeur.
Résultat : la Région a retiré ses billes en octobre 2020, forçant la Métropole à porter sa part de 15 à près de 18 millions d’euros. Les 2,99 millions apportés initialement par la Région seront affectés au financement de pistes cyclables dans le secteur de cet échangeur, opérations qui figuraient de toute façon dans le projet.
Si Vinci ne s’était pas montré intraitable, l’affaire aurait suivi son cours sans remous et, en dehors des élus, pas grand monde ne se serait ému de la construction de cet échangeur. Dans une période où Moudenc – comme d’autres politiques - ne cesse de vanter ses actions en faveur du vélo, des transports en commun, de la réduction de l’utilisation de la voiture, de la lutte contre le réchauffement climatique, il aura du mal à nous convaincre qu’un tel projet va dans ce sens. Et cela d’autant plus que la liaison autoroutière Castres-Toulouse vient d’être validée par le Conseil d’Etat. L’échangeur et l’autoroute sont distants de quelques kilomètres, sur le même secteur du périphérique Est, dans une même logique, à l’opposé d’une politique de réduction de l’utilisation de l’automobile, exacerbant ainsi la crise climatique.
C’est ici l’occasion de rappeler deux demandes de l’association 2 pieds-2 roues que nous avons soutenues lors des dernières élections municipales à Toulouse : la création d’un Réseau Express Vélo de 8 lignes et un budget de 40 M€/an pour la politique cyclable. Les 18 millions engagés par la Métropole auraient pu bien plus utilement contribuer à ces projets, aussi bien sur Toulouse que pour les autres villes de la Métropole.
Commission Ecologie du NPA - 31