Par Ian Simplon, le 4 juillet 2015
Pour répondre au défi posé à l’humanité par la crise climatique, deux contraintes majeures guident notre réponse :
1- l’ampleur et l’urgence du changement nécessaire : les émissions de gaz à effet de serre (GES) doivent baisser de 80 à 95% d’ici 2050 d’après les chiffres du GIEC, ce qui revient pour nous à une sortie totale des énergies fossiles à cet horizon, sachant que 80% de l’énergie actuelle est d’origine fossile.
Ce n’est pas un simple changement de mode de vie mais de tout l’appareil de production et de l’organisation de la société.
Un frein majeur à ce changement : on estime que 80% des réserves connues d’énergies fossiles doivent rester sous terre, or ces réserves sont déjà appropriées. Ceci rentre en confrontation directe avec les intérêts capitalistes, qui ont intérêt à valoriser ces stocks (voir les surprofits de la rente pétrolière), il est donc nécessaire d’exproprier ces intérêts privés pour pouvoir mettre en œuvre la transition énergétique.
Ceci rentre également en confrontation avec les intérêts nationaux puisque les ressources énergétiques sont inégalement réparties : voir l’exemple de l’Équateur (tentative de monnayer le fait de laisser le pétrole sous terre), ou des régimes extractivistes (Venezuela…) largement dépendants de la rente pétrolière
2- le caractère planétaire de la crise : pas de solution à l’échelle d’un seul pays ou d’un seul continent, il faut une planification mondiale.
Mais il faut aussi prendre en compte l’inégalité de responsabilités dans la crise climatique (essentiellement celle des pays capitalistes avancés), l’inégalité face aux effets (augmentation de température non uniforme…) et l’inégalité face aux conséquences (inégalité selon infrastructure du pays, mais aussi entre classes sociales…).
Cela touche à une série de questions dans les rapports nord-sud :
– le transfert technologique et la libération des brevets pour permettre aux pays du sud de se développer en utilisant les énergies renouvelables
– mais aussi la solidarité internationale face aux effets de la crise climatique (puisque la crise est déjà là et même en cas de sortie instantanée des énergies fossiles, l’inertie du système fait que la température continuerait d’augmenter : santé, liberté de circulation et accueil des réfugiés climatiques…
Pour éviter un emballement potentiellement dramatique, il faut donc mettre en œuvre une transition énergétique rapide et radicale à l’échelle mondiale pour sortir des énergies fossiles, et aussi du nucléaire (même si c’est un problème plutôt franco-français).
Problème : la mise en œuvre de cette transition est-elle même consommatrice de beaucoup d’énergie et donc génératrice de GES supplémentaire, il faut donc compenser par une baisse importante de la production matérielle.
Dans le même temps, il y a des besoins sociaux urgents à satisfaire, cela n’est donc pas possible sans un contrôle démocratique de la population permettant d’arrêter les productions nuisibles et inutiles (impliquant la suppression de la publicité pour permettre la détermination des besoins réels), ainsi qu’une diminution du temps de travail et une reconversion des travailleurs concernés.
Plus généralement, la transition énergétique s’organise autour de la logique suivante qui fait largement consensus : sobriété, efficacité puis renouvelables.
Ce qui signifie :
- sobriété : celle-ci se situe non pas au niveau individuel mais à l’échelle de la société. En clair il s’agit de consommer moins d’énergie (il faudrait atteindre -50% de consommation d’énergie pour l’Europe, -75% pour les États-Unis), sachant que la consommation d’énergie actuelle se divise en gros en trois tiers : la production (industrielle et agricole), les bâtiments (habitats, tertiaire…) et les transports (marchandises et personnes)
– pour la production : voir au-dessus, ainsi que la mise au pas de l’agro-industrie
– pour les bâtiments, cela nécessite un vaste plan d’isolation des bâtiments, en commençant par les logements sociaux et les bâtiments publics
– pour les transports : concernant les marchandises, il s’agit de diminuer les distances entre lieux de production et de consommation (le contrôle démocratique de la finalité de la production doit permettre de produire pour les besoins locaux et non pour le marché mondial).
Concernant les personnes, il faut développer les transports en commun et leur gratuité, mais aussi diminuer les distances domicile-travail (problème du logement…)
- efficacité : il s’agit de gagner en rationalité dans la production, par la cogénération (récupérer la chaleur produite lors de la production d’électricité), mais aussi en limitant le recours à l’électricité qui ne représente que 20% des besoins énergétiques (éviter l’absurdité de produire de la chaleur pour produire de l’électricité pour produire de la chaleur… avec à chaque fois des pertes)
- renouvelables : sans rentrer dans le détail, il faut rappeler que l’énergie est aussi un enjeu de pouvoir politique et que notre conception du renouvelable est celle d’une production décentralisée et contrôlée démocratiquement.
En conclusion, la crise climatique nécessite une réactualisation de notre programme transitoire, des tâches des révolutionnaires et des mesures clé essentielles à prendre en cas de prise du pouvoir.
Nous avons également une responsabilité particulière, étant les seuls à pouvoir formuler une réponse conséquente, à la hauteur du problème, d’où l’importance de prendre toute notre place dans le débat et la mobilisation autour de la COP-21 (à Paris en décembre 2015).