Depuis le début du confinement, les témoignages affluent de la part de femmes qui se sentent de plus en plus en insécurité dans la rue. La page #PayeTonConfinement les recense.
Le harcèlement de rue recouvre un ensemble d’agressions des hommes sur les femmes dans l’espace public, pouvant se manifester par des sifflements, des regards insistants, des propos sexistes, des invitations à caractère sexuel ainsi que des menaces d’agressions physiques et/ou sexuelles. Le caractère répétitif de ses violences génère pour les femmes un environnement hostile dans lequel elles ne se sentent pas en sécurité et qui entrave leur liberté de se déplacer.
Pourquoi ? Parce que l’espace public est un territoire majoritairement masculin où les hommes s’inscrivent d’une façon plus prolongée que les femmes qui s’en retrouvent donc exclues. C’est un cercle vicieux, comme les femmes sont plus souvent victimes d’agression que les hommes dans la rue, elles sortent moins souvent, se font rares dans l’espace public et sont d’autant plus des cibles. Le harcèlement de rue ce n’est pas de l’humour, ce ne sont pas des compliments et nous n’avons pas à voir ces agressions systématiques comme de la drague.
« Eh mademoiselle », « vous êtes trop belle », « vous avez un numéro », « t’es bonne », « petite chienne », … relèvent d’une intrusion dans notre intimité de manière non consentie.
Mais alors comment le confinement renforce t’il le harcèlement de rue alors que l’on pourrait penser qu’il tendrait à le diminuer ? Plusieurs explications peuvent répondre a cette question. Premièrement, si nous pouvions nous sentir protégées par la présence de monde dans la rue qui pourraient nous défendre, nous nous retrouvons maintenant seules face à nos agresseurs. Eux, se sentent tout permis, car ils savent très bien qu’il n’y aura aucun témoin. Ce qui rend la situation encore plus dangereuse qu’elle ne l’était auparavant.
Deuxièmement, les femmes sont les premières actrices de ce confinement : aides-soignantes, infirmières, caissières… Nous nous retrouvons à devoir nous rendre au travail souvent de nuit, parfois très tôt le matin pour en sortir en sortir que très tard le soir. A ces heures-là, les rues sont encore plus vides. Difficile aussi de se repérer ou de voir le danger arriver. L’agresseur sait qu’il est seul avec sa victime et qu’il y a peu de chance qu’elle le reconnaisse.
Enfin dernièrement, le réseau de transport en commun a diminué en cette période de confinement. Par exemple, à Toulouse, la fréquence de passages des lignes de métro et de tramways s’est rallongée, certaines lignes de bus ont complètement cessées de fonctionner et l’heure du dernier départ a été fortement avancée. On attend plus longtemps le métro, tram ou bus, on marche plus longtemps pour accéder à ceux-ci et parfois nous sommes obligées de rentrer de notre travail jusqu’à notre domicile à pieds à cause de la fermeture des transports en communs de nuit. Nous nous retrouvons seules et vulnérables dans l’espace public et devenons de véritables proies à la merci des hommes.
Pourtant plein de choses pourraient être mises en place pour que nous soyons en sécurité : la reprise du trafic normal des transports en commun par exemple, en garantissant bien sûr la sécurité des travailleurs et des travailleuses de ce secteur, les transports à la demande notamment pour les lieux de soins, un meilleur éclairage publique, l’arrêt à la demande des bus, des autorisations de sortie de confinement pour du covoiturage entre les travailleuses d’un même secteur ou des accompagnantes…Mais surtout il faut agir pour qu’il y ait une prise de conscience : ces situations ne sont pas normales et il nous faut un mouvement féministe large uni pour agir !
Emma de Toulouse