Confinement d’un étudiant, salarié dans l’alimentation
Le confinement pour lutter contre la propagation du Covid-19 entre dans sa 3ème semaine et il est difficile actuellement d’en estimer la fin. Refusant toute remise en question le Président Macron n’hésite pas à qualifier « d’irresponsables ceux qui cherchent déjà à faire des procès ». Pourtant la stratégie du gouvernement pose de nombreuses questions. Pourquoi, alors que l’on approche de la barre des 4000 morts, maintenir les activités économiques non-essentielles contrairement à ce qu’a fait l’Italie ?
Pourtant, dans le même temps, Macron ne cesse d’insister sur l’importance de rester chez soi, tout en donnant les pleins pouvoirs à une Police en roue libre pour faire respecter ses mesures. Le but est de limiter les effets sur l’économie et l’impact de la crise économique qui s’annonce. Une nouvelle fois, ce gouvernement choisit le bon fonctionnement de l’économie capitaliste aux dépens de la santé des classes populaires.
Les femmes tout d’abord, ultra majoritaires dans les hôpitaux ou comme hôtesses de caisse, secteurs en première ligne face à l’épidémie et confrontés de plein fouet au risque de contamination. Les sans domicile fixe, recevant des amendes pour non-respect du confinement, et toujours plus oublié.e.s par l’État. Aussi les ouvrier.ère.s, salarié.e.s du commerce et tous ceux contraint.e de travailler malgré une épidémie les mettant en danger.
Les jeunes également, disposent très souvent de situation précaire, à mi-chemin entre les problématiques de l’enseignement et celles du monde du travail.
Ayant pour ma part un statut d’étudiant à Toulouse, mais également salarié, en mise en rayon dans un supermarché, je vois les difficultés que cela entraîne au quotidien, qui sont exacerbées dans cette période de confinement. Alors que les universités sont officiellement fermées, il a été annoncé aux étudiant.e.s que l’évaluation continuerait sous forme de cours en ligne, de visioconférences et d’examens en ligne. Ces mesures rompent l’égalité des chances déjà tant mis à mal par les différentes attaques libérales de ces dernières décennies contre l’université à la française. Tout le monde ne dispose pas du matériel adéquat (connexion internet, ordinateur...). Également tout le monde ne dispose pas du temps nécessaire.
La grande distribution est sans aucun doute un des secteurs en première ligne dans cette crise. En effet la charge de travail a augmenté de manière exponentielle sur mon lieu de travail. Mais alors que le bénéfice moyen de la grande distribution a augmenté de 37% depuis le début de l’épidémie, il n’y a pas eu d’embauche pour soulager le personnel. Malgré certains efforts faits (masques, vitres en plexiglas aux caisses), la proximité permanente avec le client et surtout nos collègues nous expose quotidiennement au virus.
Comment respecter les gestes barrières quand nous sommes entassées à 5 dans un bureau de 3m carré (servant à gérer le Drive), non adapté à cette hausse d’activité ponctuelle. Il nous est effectivement possible de refuser les heures supplémentaires ou d’exercer notre droit de retrait. Personne dans mon magasin ne l’a fait, car la somme que cela représente est difficile à refuser dans un milieu aussi précaire. Personnellement, cet argent m’est indispensable pour financer mes études.
Aussi, nous avons conscience de l’importance majeure de notre travail dans la période, ce que notre patron a bien compris et il s’en sert sans retenue. Nous sommes prêt.e.s à mettre en danger notre santé, pas pour faire plaisir à la direction, mais par solidarité et parce que nous savons notre travail indispensable. Cela ne doit pas nous empêcher de nous organiser et de militer aussi bien sur nos lieux de travail qu’en dehors pour défendre notre droit à des conditions de travail digne. L’idée n’est pas ici de « faire des procès » mais de faire passer les considérations humaines avant les considérations économiques. S’il faut trouver des irresponsables, ils ou elles ne sont certainement pas dans notre classe.
Toulouse, le 4 avril 2020
Bastien membre du comité jeune du NPA 31