Source : site d’Anticapitalistas
Face aux attentats perpétrés à Paris le vendredi 13 novembre, Anticapitalistas condamne la barbarie et se solidarise avec ceux qui en souffrent. Notre message de soutien et d’empathie est destiné aux personnes affectée et notre indignation et colère face à ce qu’il s’est produit.
L’objectif du terrorisme n’est autre que de créer un état permanent de terreur, de haine et de défiance généralisés au sein de la population. Si la réponse passe par des libertés réduites, moins de démocratie et de nouvelles violations des droits humains, alors ils auront réussi leur objectif. Répondre à la haine par plus de haine et à la terreur par plus de terreur signifie donner la victoire aux terroristes et réalimenter la barbarie.
Ceux qui prétendent criminaliser tout un groupe social, par le simple fait d’avoir en commun une origine géographique, des phénotypes humains et un substrat culturel supposé commun, tombent dans le même aveuglement et dans le même schéma de confrontation en blocs et de choc des civilisations que développe la droite xénophobe. Le mal nommé État islamique, qui n’est ni un État ni islamique, n’a donc rien à voir avec les plus de 1.500 millions de musulmans dans le monde et qui, depuis le début, condamnent ces attentats et bien d’autres similaires. Aujourd’hui, le focus est sur Paris, mais il faut rappeler que la majorité des victimes de la barbarie djihadiste, dans ses différentes versions et fractions, sont les musulmans eux-mêmes. Le fanatisme religieux, de quelque type qu’il soit, est toujours un ennemi du peuple, comme le sont aussi l’impérialisme et les politiques racistes.
De la même façon que nous critiquons les réactions automatiques et simplistes, nous critiquons les analyses mécanicistes et unilatérales. L’impérialisme occidental n’est pas l’unique cause du fanatisme religieux ni des attentats qu’il commet, bien qu’il contribue résolument à faire tourner une roue d’action/réaction mortifère et offre un alibi politique à ceux qui, des deux côtés, ont intérêt à soutenir un monde en blocs fermés qui s’affrontent, divisant les peuples et les classes ouvrières. Les djihadistes se créent dans les mosquées radicalisées et minoritaires, mais aussi dans les prisons, les quartiers affectés par le chômage et la pauvreté, dans les décombres des bombardements.
Les interventions militaires extérieures s’ajoutent à la politique commerciale et économique à l’étranger des grandes puissances envers les pays du Sud global, aux murs et centres de rétention administrative de l’Europe forteresse, aux modèles d’intégration raciale par assimilation aux politiques d’austérité qui, dans le monde entier, génèrent la pauvreté, les inégalités et les guerres. C’est cela le bouillon de culture du fanatisme. Combattre ce dernier passe par le vider et non par y verser encore plus de liquide incendiaire.
Fermer les frontières, suspendre les libertés civiles, militariser l’espace public, endurcir le Code pénal et agiter la haine raciale sont le véritable programme du terrorisme. Perpétuer l’état d’urgence ou les prétendus pactes antiterroristes, qui n’attaquent pas les causes mais seulement les effets, sont des solutions uniquement cosmétiques face à la galerie, quand ce ne sont pas des retournements finaux dans la spirale de la terreur globale. La solidarité est le réconfort entre les peuples, et non la connivence avec ceux qui provoquent l’horreur et alimentent la spirale de la violence. pour cela, nous sommes préoccupés à l’idée que la réponse à ces attentats passe par le renforcement de valeurs et de pratiques qu’ils cherchent à instaurer. ou que ce massacre soit utilisé pour criminaliser encore plus les réfugiés qui arrivent en Europe et fuient précisément le fondamentalisme religieux, le haine et la mort qu’il génère.
Que les attentats de Paris de viennent le "11 septembre européen" ne dépendra pas tant du nombre final de victimes que des réactions et des conséquences politiques qui en dérivent. Le cycle de guerre globale permanente, des libertés réduites et des politiques racistes commencé en 2001 explique en grande partie les attaques de Paris et devrait représenter une leçon pour ce nouveau défi. Il est encore temps. Cependant, les principales forces politiques en France, en Espagne et en Europe parlent déjà de la "guerre du XXIe siècle" et répondent en termes d’unité nationale, de sécurité policière et de haine raciale. Plus qu’une réponse, cela semble être un programme électoral et de gouvernement de la droite la plus réactionnaire. Si nous laissons les Le Pen et les Sarkozy de chaque pays mener la réponse contre la terreur, nous trouverons toujours plus de haine et de terreur. Le souvenir de la guerre d’Irak et la gestion des attentats du 11 mars (2004) à Madrid par le gouvernement Aznar devraient nous servir d’avertissement.
Si les bombes réussissent à vider les rues et à briser la vie en commun, la répression et la haine occuperont le vide. Ce n’est pas l’heure de la peur et de s’enfermer chez soi, laissant le terrain libre à ceux qui, de l’un ou l’autre des bords, veulent ériger des murs de défiance entre les classes populaires. C’est l’heure du peuple, de créer des communautés vivantes, ouvertes et solidaires. Car, là où il y a des gens organisés, le fanatisme et la haine n’entrent pas, qu’ils aient l’étiquette de djihadiste ou de néofasciste. Il n’y a qu’une seule réponse : plus de démocratie, plus de droits, plus de vivre-ensemble. Notre plus ferme rejet de toutes les formes de haine et de ceux qui les alimentent de chaque côté, est seulement comparable à notre plus ferme solidarité et plus ferme soutien à ceux qui en souffrent et à ceux qui les combattent. Seul le peuple sauve le peuple. Seuls les peuples sauvent les peuples.
Anticapitalistas, 14 novembre 2015.