Que l’eau soit gérée publiquement, comme devrait l’être tout bien commun, voilà l’objectif d’Eau publique Toulouse métropole. Ce collectif a été créé le 2 novembre dernier à l’initiative d’Eau secours 31, une association qui se mobilise déjà sur la question depuis plusieurs années. L’enjeu ? En 2020, la plupart des contrats des différentes municipalités qui forment Toulouse Métropole viendront à terme et un mode unique de gestion pourrait être mis en place.
Entretien avec Lucien Sanchez, membre de Eau Secours 31, et porte-parole du collectif Eau publique - Toulouse Métropole.
L’assainissement est devenu une compétence communautaire depuis 2001 et l’eau depuis 2009. Cela signifie que c’est Toulouse Métropole, soit 37 communes, qui décide. Telle ou telle commune peut toujours émettre un vœu sur le mode de gestion qu’elle désire, mais c’est au final le conseil de la Métropole qui décide.
Sur la Métropole, coexistent actuellement différents modes de gestion : des délégations de service public (DSP : affermage le plus souvent, concession dans le seul cas de Toulouse) au bénéfice de Véolia et de Suez, des marchés de prestations avec ces mêmes groupes privés, une convention de coopération avec le Syndicat des eaux de la Montagne Noire, et des régies-eau dans cinq communes de l’Ouest (Colomiers, Tournefeuille, Brax, Cornebarrieu, Pibrac), mais seulement trois régies pour l’assainissement, avec marché de prestation (Colomiers, Tournefeuille).
Ces questions sont résumées dans la plate-forme du collectif. En voici les principaux extraits :
« L’eau est un bien commun dont la gestion ne saurait être confiée à des multinationales ou à des groupes privés dont l’objectif fondamental reste la recherche de profits.
La préservation de cette ressource si précieuse, la garantie de son accès à tous, nécessitent un réel contrôle par les citoyennes et citoyens, par les associations d’usagers domestiques et les élus. Ce contrôle, seule une régie publique peut l’assurer, par la possibilité d’accès à tous les documents juridiques, techniques et comptables.
L’absence de recherche de profits au bénéfice d’actionnaires permet aux régies d’avoir des tarifs globalement inférieurs de 20% environ à ceux pratiqués par les délégataires privés. Une régie publique permettra la mise en œuvre d’un juste tarif de l’eau et de l’assainissement, incluant les investissements nécessaires, sans la recherche de profits.
Alors que de graves problèmes restent posés (pesticides, nano-éléments, perturbateurs endocriniens, résidus médicamenteux), l’exigence d’une haute qualité sanitaire de l’eau peut être portée par les associations d’usagers domestiques en qualité d’administrateurs au même titre que les élus, au sein d’une régie publique, possibilité qui est exclue dans la gestion privée.
Le choix d’une régie publique pourra s’appuyer sur les compétences des personnels des services de l’eau et de l’assainissement, mises au service de l’intérêt général de la population de la Métropole. »
La politique de Moudenc depuis son élection a été de tout caler sur la fin du contrat à Toulouse avec Véolia en 2020. Les contrats venus à échéance dans les autres villes ont été transformés en marchés de prestations jusqu’en 2020, si bien qu’en dehors d’un contrat couvrant 11 communes (autour de L’Union, Castelginest) allant jusqu’en 2023, tout est aligné sur 2020. Avec la volonté affichée de mettre en place un mode unique de gestion. Ce qu’il n’est par ailleurs pas obligé de faire.
Moudenc a fait adopter le 29 juin dernier deux délibérations ouvrant une procédure de délégation de service public (DSP) et d’autre part une étude pour voir la viabilité d’une régie. La première étape de la DSP a consisté à sélectionner quatre candidats. Ce sont Véolia, Suez, et deux groupes espagnols, Aqualia et Aguas de Valencia.
Mais nous avons de fortes craintes que cette procédure de DSP soit si engagée qu’il sera difficile, pour ne pas dire impossible, une fois l’ouverture des plis réalisée (fin mars ou début avril 2018), c’est-à-dire une fois que Moudenc aura pris connaissance des propositions des quatre entreprises, de faire marche arrière au bénéfice de la régie. D’autant plus que l’étude sur la régie risque de ne pas être conduite avec toute l’objectivité nécessaire et que la Métropole a fait appel, en assistance à maîtrise d’ouvrage, à des cabinets, dont on connaît (pas pour tous mais quand même…) le penchant à travailler en faveur des groupes privés.
La décision finale sur le mode de gestion doit intervenir fin 2018. Mais si nous voulons enrayer le processus qui risque de conduire à une DSP, il nous faut construire la mobilisation avant l’ouverture des plis.
Nous, Eau Secours 31, avons décidé de proposer la formation d’un collectif qui ne soit pas un simple cartel d’organisations. Le collectif est ouvert à toutes celles et ceux qui veulent se mobiliser. Le collectif regroupe donc des personnes, des associations, des syndicats, avec le soutien d’élu.e.s et de partis politiques. Il a adopté une plate-forme et une pétition.
Nous avons eu déjà un bon écho dans les médias et sommes intervenus par voie de tract au conseil de la Métropole le 9 novembre. Il s’agit maintenant d’aller sur le terrain, avec l’outil de la pétition pour débattre, informer. Et puis organiser des réunions publiques dans le maximum de villes de la Métropole, mais aussi dans les quartiers de Toulouse.
Nous avons une journée de formation-débats le 9 décembre, et avons arrêté le principe d’États généraux de l’eau en février 2018.
Toutes les informations sur les actions du Collectif sont sur le site de Eau Secours 31.
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