Ça y est : Emmanuel Macron est installé à l’Élysée. Et à Matignon, Édouard Philippe, le député-maire Les Républicains du Havre, est nommé premier ministre.
Le « renouveau » en marche avec du vieux
Avec cet ex-membre du cabinet d’Alain Juppé, accompagné de politiciens de gauche et de droite connus depuis longtemps comme François Bayrou, Gérard Collomb (le maire PS de Lyon) ou Jean-Paul Delevoye, ancien ministre de Chirac, le renouveau gouvernemental a sacrement le goût du vieux.
Macron met aussi en avant la « société civile » qu’En Marche présente comme candidats aux législatives, ces nouveaux venus à la politique. Leur profil est bien particulier. Les plus nombreux, ce sont les patrons (on en compterait déjà 58 parmi les candidats d’En Marche). Et les autres, ce sont des cadres d’entreprises, des avocats ou des médecins. Quant aux salariés de base, il faut les chercher à la loupe.
Le programme de Macron est parfaitement en phase avec ses soutiens. Il ne s’en cache pas, lui qui veut « libérer le travail [traduire : massacrer les salariés] et soutenir les entreprises ». Cet été, ce sera l’attaque contre le Code du travail par ordonnances, encore plus expéditive que la loi Travail que Valls avait fait passer à coups de 49-3. Macron compte aussi supprimer des emplois dans les services publics. Il veut aussi s’attaquer au système de retraite et contraindre les chômeurs à accepter n’importe quel emploi, sous la menace de suppression des indemnités.
Macron veut « réunir la gauche et la droite », dit-il. C’est réussi. C’est la synthèse des politiques antisociales menées par les gouvernements successifs, de la réforme des retraites de Juppé en 1995 à la loi Travail de Valls de 2016 !
Leur « société civile » et la nôtre
Il n’y a aucune ambiguïté. Pour le monde du travail, Emmanuel Macron est un ennemi déclaré, décomplexé. Sa « société civile », c’est la bourgeoisie et ceux qu’elle délègue pour encadrer ce monde capitaliste ; rien à voir avec la population travailleuse, rien à voir avec les chômeurs, les jeunes qui subissent la précarité et les bas salaires.
Au second tour de la présidentielle, on avait le choix entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen, une politicienne d’extrême droite qui est, malgré ses discours « sociaux », tout autant au service des patrons que les autres, avec, en prime, la distillation du racisme et l’antisyndicalisme. Pas étonnant que nombreux ont préféré s’abstenir ou voter blanc ou nul dans ce vote où on n’avait le choix qu’entre deux ennemis du monde du travail.
Mais il serait temps que notre « société civile », celle d’en bas, se fasse entendre, et vraiment cette fois. Qu’elle se mette aussi en marche pour défendre et faire entendre ses intérêts. Cela ne pourra prendre qu’une voie, celle de la lutte sociale, dans la rue, dans les entreprises. Car c’est le seul outil dont nous disposons pour peser. Mobilisés, nombreux, nous pouvons être une force qui se ferait craindre des patrons et de tous les politiciens. Alain Juppé avait bien dû reculer sur sa réforme des retraites devant la mobilisation en décembre 1995. Faisons connaître à son élève Édouard Philippe le même sort.
Ces derniers jours, les plans sociaux et annonces de fermetures d’entreprises se multiplient. Tati en liquidation judiciaire, fermeture de Whirlpool à Amiens, annonce de 1 900 suppressions de postes chez Engie (l’ancien GDF-Suez), et la liste n’est pas close : les patrons se sentent confortés, ils sont à l’offensive. Les ouvriers de GM&S dans la Creuse, un sous-traitant de l’automobile, sont en lutte depuis des semaines contre la menace de fermeture de leur usine. Un rassemblement pour les soutenir a eu lieu ce mardi 16 mai.
Il faut saisir toutes les occasions pour faire entendre que les travailleurs ne sont pas prêts à accepter les mauvais coups des patrons et du nouveau président. Préparer la riposte contre les attaques patronales et gouvernementales, c’est tout de suite !
Mardi 16 mai 2017
Entre les deux tours de la présidentielle, Tom Enders a écrit une lettre de soutien à Macron, dans laquelle il lui dit : « tu incarnes de manière très concrète le changement » et il lui demande de mener « les réformes économiques qui s’imposent ».
Effectivement Macron incarne bien le libéralisme, c’est d’ailleurs tout son programme : retour aux 39 heures, casse de la protection sociale et du Code du travail, c’est ce que Tom Enders appelle de ses vœux.
Nous voilà prévenus.
L’EBIT du groupe Airbus (son résultat d’exploitation) pour le premier trimestre 2017 a baissé de 52 % par rapport à celui du premier trimestre 2016. Les causes en sont multiples (livraisons retardées à cause des problèmes de moteurs Pratt et Withney, moins de prise de commandes, problèmes de l’A400M…). Mais l’essentiel pour les actionnaires est que le bénéfice net du trimestre a, lui, augmenté de 52 % !
Ce brillant résultat est dû à la finalisation de la vente à KKR de l’entité Defence Electronics. Les travailleurs de cette entité apprécieront sûrement d’avoir, bien malgré eux, contribué fortement à satisfaire les actionnaires ! Et cette politique de vente des bijoux de famille montre bien le parasitisme des actionnaires…
Pour faire « comme les grands », la nouvelle direction de Latécoère américanise les titres. Ainsi Thierry Mootz, ancien « Directeur de la performance » est nommé « Chief Operating Officer », titre qui remplace « Directeur de l’exploitation ».
Dans ce cadre, le « Lean Management », autrement dit la recherche obsessionnelle du rendement, a bien sûr de beaux jours devant lui.
Les salariés en lutte de GM&S de La Souterraine dans la Creuse ont détruit jeudi 10 mai devant les caméras de télévision plusieurs de leurs machines et annoncé leur intention de faire sauter l’usine pour attirer l’attention sur la menace du patronat de faire sauter leurs emplois, avec la fermeture programmée de celle-ci.
Depuis des mois les 279 travailleurs du site, menacé par une liquidation judiciaire, luttent seuls, confrontés au mépris de donneurs d’ordre et à l’indifférence des politiciens de droite comme de gauche en campagne.
Mardi 16 mai, ils ont organisé un rassemblement national à La Souterraine pour exiger que Renault et PSA assurent le maintien de l’usine et la garantie de leurs emplois. Car GM&S n’est qu’un sous-traitant des deux trusts de l’automobile qui ont fait leurs profits sur le dos des salariés avant de condamner le site en stoppant les commandes.
Le système informatique du système de santé anglais (entre autres) a été fortement touché par l’opération de cyber-racket de ce week-end. Les dossiers médicaux inaccessibles, des dizaines de milliers de consultations et d’opérations ont été reportées.
Si on ignore encore d’où vient cette attaque, certains responsables de ce fiasco sont déjà connus :
– la NSA américaine : elle connaissait depuis longtemps la faille de sécurité qu’ont exploitée les hackers, mais n’a rien dit à personne, espérant s’en servir elle-même ;
– Microsoft qui facture à prix d’or les mises à jour de sécurité, s’assurant ainsi une rente permanente ;
– le gouvernement britannique : dès 2015, à choisir entre payer encore les mises à jour ou renouveler le parc informatique pour passer à une version plus récente, il a décidé… de ne plus rien faire !
Surveillance, rente de monopole et austérité, un cyber-cocktail bien amer pour la population.
58 patrons, 17 avocats, 13 médecins, 12 acteurs de la finance… Macron veut faire entrer la « société civile » à l’Assemblée. Pourtant, à regarder sa première liste de novices en politique, on a bien du mal à s’y retrouver.
Aujourd’hui, seuls 2 % des députés à l’Assemblée proviennent de la catégorie employés et ouvriers… Visiblement, ce n’est pas Macron qui va changer cela.