Après quatre jours d’arrêt de la production, celle-ci a repris lundi 23 mars. À l’exigence de la CGT de renoncer à la reprise de la production la Direction n’apporte que des réponses embarrassées avec des prévisions de production très modestes. Il s’agirait d’assurer une continuité de la production pour repartir plus vite lorsque la crise sera passée.
Aberration et écœurement
Insupportable au moment où la moitié de la population du globe est confinée et où la quasi-totalité des compagnies aériennes sont à l’arrêt complet. Ainsi, on a même vu que, sur certains aéroports, il devenait difficile de… stationner les avions immobilisés.
L’incompréhension mêlée d’écœurement des salariés est avivée par le fait qu’Airbus s’est en fait arrangé pour accaparer des masques de protection alors que ceux-ci font cruellement défaut dans les services hospitaliers et associés. Ainsi, Airbus aurait reçu un stock de 20 000 masques en fin de semaine dernière. Un A350 est parti en Chine chercher des millions de masques pour l’état espagnol, la France et… la boite. Le tout dans une impréparation complète, avec des masques pas adaptés.
Des organisations incongrues
Comme dans beaucoup d’industrie il y a une grande différence selon les catégories de personnel. Pour tout ce qui est bureaux d’études, le télétravail est possible à 100%. Des réunions virtuelles sont organisées mais limitées pour ne pas surcharger les réseaux. Mais des équipes continuent à venir sur site. Pour éviter les contaminations elles sont organisées en deux équipes ; les « bleuEs » et les « rouges » qui ne doivent pas se croiser. Des surveillantEs sont sur place pour éviter les contacts. CertainEs qui travaillent sur simulateurs aux côtés des salariéEs de la production sont très réticents.
Du côté de la production, la direction s’est appuyée sur le volontariat mais celui-ci a donné des résultats décevants. Ils ont réorganisé la production. Les équipes en 2x9h passent en 2x6h. 6 heures travaillées... et il faudra rattraper le reste avant la fin de l’année. Les horaires seront 6 heures/12 heures, 3 heures de désinfections puis 15 heures/21 heures pour l’équipe d’après-midi. A Saint-Éloi, ils passent de de 3x8 à 3x6 avec deux heures de désinfection entre équipes ça donne 6 heures/12 heures, 14 heures/20 heures et 22 heures/4 heures. Les masques sont réservés aux zones de travail où le mètre de distance n’est pas possible comme dans les fuselages par exemple. Apparemment il est prévu aussi des caméras thermiques pour contrôler la température des salariéEs, aux entrées de l’usine. La restauration sur place est aussi supprimée provoquant la mise au chômage technique de 418 salariés du Comité social économique (CSE) au moins jusqu’au 31 mars. Les personnes à risque (asthmatiques, cardiaques, diabétiques…) sont appelées à se signaler auprès de leur médecin traitant.
La direction du groupe met la pression sous les sous-traitants. Les conditions de travail y sont catastrophiques, sans masques sans gel hydro-alcoolique. Face à cette offensive de la direction d’Airbus, une vingtaine d’organisations syndicales, CGT mais également Unsa, ont rédigé un appel unitaire de riposte. (Voir le document à la fin de cet article)
Au total, les salariéEs sont consternéEs par l’idée de poursuivre des productions non indispensables en détournant des moyens utiles et manquant dans la secteur de la santé. Le télétravail n’est pas simple car il se double souvent de la garde des enfants.
Syndicalement la CGT s’est prononcée dès le départ contre la poursuite de la production. FO, syndicat majoritaire est passé d’une position de non reprise de la production à l’accompagnement des décisions de la direction. Le retournement s’est fait en un week-end. Ils écrivent même qu’il est concevable de « finir les avions en cours d’assemblage » mais pas de lancer la production de nouveaux appareils. « Nous avons toujours su trouver des solutions avec la direction. S’il faut mettre un grand coup de collier au dernier trimestre 2020 pour rattraper le retard, les salariés seront là comme ils l’ont toujours été ! »
Espérons que, au lendemain de cette crise, les salariéEs remettent en cause leur représentation syndicale et leur vision de ce monde qui organise de tels désastres.